Une instrumentation d’exception
Pour obtenir des résultats intéressants, il est nécessaire de recourir à une instrumentation de pointe. En 1890, Maurice Loewy imagine un instrument monumental qui applique le principe du petit équatorial coudé à grande échelle. Ainsi naît, dans la partie sud ouest du jardin de l’Observatoire de Paris, le grand équatorial coudé, à l’origine du projet de l’Atlas photographique de la Lune. Tout au long des 17 années que dure cette entreprise, de 1893 à 1910, des améliorations sont apportées à l’instrument, au pavillon qui l’abrite, et au dispositif photographique qui l’accompagne.
L’objectif astronomique de 60 cm est dû aux frères Henry. En 1894, il est achromatisé pour les rayons photogéniques. La même année, pour que le mouvement de l’instrument concorde avec celui des objets célestes, l’instrument se dote d’une pièce doublement coudée avec deux prismes à réflexion totale, prolongée par une glace sans tain. Un engrenage supplémentaire complète les organes du mouvement de déclinaison.
Les frères Paul Henry (1848-1905) et Prosper Henry (1849-1903) sont originaires de Nançy. En 1865, ils entrent à l’Observatoire de Paris, où ils sont d’abord placés au service météorologique. Paul Henry est chef du service de la Carte du Ciel de 1893 à 1898, et Prosper Henry prend sa suite de 1899 à 1903. Ils se distinguent avant tout par leur précision dans la taille des objectifs astronomiques.
En 1895, une palissade est établie autour de la partie Sud de l’instrument pour le protéger du vent. La disposition introduite l’année précédente pour rendre la partie oculaire de l’instrument mobile est jugée insuffisante et Loewy réfléchit à la mise en place d’un moteur spécial, avec l’aide de M. Gautier.
C’est chose faite en 1896. Un engrenage cylindrique à roues échangeables est interposé dans le mécanisme du chariot qui porte le châssis photographique. De plus, pour protéger l’objectif contre des lumières et des dépôts importuns, un tube léger de deux mètres de longueur est installé sur le barillet de l’objectif de l’instrument.
En 1897, un mince feuillet de zinc est ajouté en protection supplémentaire de la cabane d’observation. Deux vis de rappel sont disposées sur l’instrument pour pouvoir régler l’orientation du mouvement lunaire à l’avance. Enfin, un objectif simple est substitué aux objectifs doubles employés jusqu’à présent.
En 1898, le rapport annuel annonce finalement que « le mode d’opération semble maintenant fixé jusque dans les détails ». Cela n’empêche pas quelques évolutions à la marge, dont une modification de la machine micrométrique apportée par Gautier en 1902, afin d’obtenir au microscope un champ plus grand avec un agrandissement moindre.
![Observatoire de Paris : Série de plans pour le projet d'une succursale (plans n°1 à 21) (titre forgé) / [23 images]](https://bibnum.obspm.fr/files/square_thumbnails/e11c93b29e13a117a1fe70def4bddf86.jpg "Observatoire de Paris : Série de plans pour le projet d'une succursale (plans n°1 à 21) (titre forgé) / [23 images]")
Dans les années précédant la construction du grand équatorial coudé, l’Amiral Mouchez présente un plan de création d’une succursale de l’Observatoire hors de Paris. Les buts sont multiples : échapper au trouble de l’atmosphère et aux trépidations du sol, gagner de l’espace pour loger les astronomes et installer de nouveaux instruments. Finalement, c’est sur le site de Paris que sera installé le grand équatorial coudé en 1890.
Cette photographie nous révèle la complexité de la partie oculaire du grand équatorial coudé. L’objectif astronomique a été réalisé par les frères Paul et Prosper Henry, véritables pionniers de l’astrophotographie.
Conçu par Paul Gautier en 1893 et amélioré en 1902, ce micromètre de laiton et de fer mesure les objets célestes avec une très grande précision.
Cette carte postale permet d’apprécier le vieillissement de l’instrument, 20 ans après l’achèvement du projet de l’Atlas photographique de la Lune.
Abandonné en 1939 puis démonté définitivement en 1981, le grand coudé quitte pendant un temps l’Observatoire de Paris pour être transféré à la grande halle de la Villette. L’Observatoire détient encore aujourd’hui la lunette de l’instrument.
Les réalisations des frères Henry et de Paul Gautier dépassent les frontières de l’Observatoire de Paris. Dans le cadre du projet de la Carte du Ciel, ils fabriquent l’équatorial photographique de l’Observatoire du Vatican, afin de lui permettre de cartographier les zones célestes – 3° à – 9°.